Callianthus

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Ma réponse à l’article de Genevieve Van Diest “ Et la sémiologie dans tout ça ?”

Le mois dernier, suite à son écoute de mon passage dans le podcast d’Alexandre Penot consacré à la sémiologie, Geneviève s’est interrogée sur un phénomène bien présent dans le monde du graphisme et m’a demandé, par son article mon avis sur la question.

Son interrogation fait suite au constat du choix toujours plus fréquent d’images de banques en lignes, tendant alors vers une uniformisation des tendances. “Il est facile en 2024 de créer des sites Internet, d’habiller son fil sur les réseaux sociaux sans maîtriser de compétences ni de connaissances dans les métiers de la communication et encore moins de s'intéresser aux sources de la composition ou du concepteur de l'image. De nombreux visuels sont puisés dans des banques d’images communes, ou l’usager choisit le visuel avec pour seul motif d’illustrer le sujet de ses propos, de rendre attractif son contenu. Cet air de “déjà vu” conditionne le choix de l’usager. Il ne se rend même pas compte que ce qui circule déjà sur les réseaux influence ses choix.” Voici ce qu’elle me demande :

Cet “air de déjà vu” qui influence l’usager dans son choix d’image pour illustrer ses services et identifier ses services, ne va-t-il pas atteindre l’objectif contraire de celui recherché ?Léah, toi qui es sémiologue et qui connais l’évolution des signes et des symboles, que penses-tu de cette pratique ? Aurais-tu un avis rassurant ou une mise en garde à partager ?

Ma réponse est plutôt simple. La voici.

Selon moi, une piste à suivre serait celle de prendre le principe de l’effet de simple exposition pour repeupler nos imaginaires consciemment avec notre héritage. C’est comme ça que nous retisserons la nouvelle corde. Plutôt que de se contenter de banques d’images creuses, cela nous connecterait et nous rapprocherait tous si nous partagions les mêmes références, ce que nous ne faisons plus, et qui est peut-être à l’origine de nombre de nos conflits.

Ainsi, je propose de repeupler nos imaginaires avec des images de notre environnement, de ce que nous côtoyons chaque jour sans forcément y penser : remettre sur le devant de la scène la reconnaissance des feuilles d’arbres, des fleurs, des empreintes d’animaux, comme un jeu de piste qui nous interroge sur la place que nous voulons avoir dans notre monde. Et, évidemment, sur les récits qui les constituent.

Pour moi, influencer n’est pas forcément une mauvaise chose, mais il faut choisir en conscience ce qui va nourrir notre imaginaire. Alors, autant que cela ait du sens. Autant pouvoir se dire que, lorsque je passe à côté d’un arbre, il a un tas d’histoires à me raconter ou que ce lieu est porteur de légendes. Il faut réfléchir en termes de stimulation : qu’est-ce qui stimule ma créativité, ma joie ? Je suis convaincue de la force des symboles et de leur utilité à ce niveau.

Je crois ainsi que mon avis serait rassurant. Choisissons de peupler notre âme et notre esprit d’histoires qui inspirent, qui élèvent, qui sont toutes uniques mais en même temps universelles. Choisissons de nous raconter, par la force des symboles, une réalité vivante, en mouvement et toujours propice au dialogue avec l’autre, plutôt que de sombrer dans un tunnel de conformisme qui ternirait notre rapport au monde.

Voici deux pistes à explorer pour les lecteurs :

  • Le livre "L’Espèce fabulatrice" de Nancy Huston

    Ce livre explore la nature humaine à travers le prisme de la narration et de la fiction. Huston y propose l'idée que l'être humain est fondamentalement une espèce qui invente et raconte des histoires. Selon elle, ces récits sont essentiels à notre compréhension du monde, de nous-mêmes et des autres.

    • « Nous sommes tous des Homo sapiens fabulans, des humains sages qui inventent des fables. »

    • « Raconter des histoires, c’est organiser le chaos, donner du sens à ce qui semble n’en avoir aucun. »

    • « À travers les âges, les histoires ont servi à instruire, à consoler, à manipuler et à inspirer. »

  • Le livre "La Puissance du mythe" de Joseph Campbell

    • « La mythologie n'est pas un mensonge, la mythologie est de la poésie, c'est une métaphore. Il a été bien dit que la mythologie est la vérité pénultième — pénultième parce que l'ultime ne peut être mis en mots. Il est au-delà des mots. »

Voilà, Geneviève, ce que je pourrais te répondre !