La violette, d’humilité à suavité il n’y a qu’un pas !

« Ô toi, illustre Athènes, brillante, couronnée de violettes et fameuse par ton chant, rempart de l’Hellade, cité divine »
— Pindare

Retrouvons-nous, pour ce lundi herboristerie avec la violette, fleur parmi les fleurs, qui évoque, à la suite de la primevère toujours ce beau printemps qui s’installe et qui, comme cette citation du poète antique nous le révèle, est synonyme de beauté absolue!


Et si nous apprenions à regarder la violette pour la comprendre ?


En effet, l’allure de cette fleur et sa taille ainsi que la forme de ses fleurs nous renseignent déjà sur les symboliques qui lui sont associées.

Vous la voyez, cette petite fleur qui pousse auprès de ces arbres géants, avec sa corolle qui retombe vers le sol, comme si elle exprimait sa timidité ou sa modestie ?  

L’humble violette qui, dans la forêt, croit au pied des grands arbres disait Diderot. Sa tige bien droite fait brusquement un coude comme pour abaisser sa tête vers le sol, modestement.

Saint Bernard, lui, disait de la violette qu’elle était l’emblème de l’humilité car elle est petite et croit à même le sol. C’est pour cela qu’elle fut inclue très tôt dans les fleurs mariales. 

D’ailleurs, dans le langage des fleurs, quand un homme offre des fleurs à une femme, c’est qu’il pense à elle en secret. Il révèle l’humilité la pudeur et la profondeur de ses sentiments. 

C’est exactement ce qu’ont dit les Anciens à son propos : elle était douce, délicate et modeste !

Voyez plutôt comment elle intervient dans la légende grecque qui lui a donné son nom ( en grec violette se dit ion, comme la nymphe protagoniste de cette courte histoire. )

Zeus amoureux d’Io la transforma en génisse blanche pour la mettre à l’abri de la folie de sa femme Héra. Pour la consoler de cette indigne métamorphose et la nourrir agréablement il transforma ses larmes en violettes parfumées.

La violette était tenue en grande estime dans l’Antiquité, comme nous l’a dit Pindare ! Et pour cause : ses propriétés et ses vertus. En effet, la violette apaise la toux, soigne la peau ou encore favorise le sommeil.

C’est une des plantes les plus parfumées du règne végétal. Elle doit son omniprésence dans l’art à cette particularité. Elle est évidemment réputée pour le parfum qu’elle dégage…! Proche de celui de l’iris.

Une note suave qui a fait tourner les têtes et les impératrices.

Vous reconnaissez ici la reine Victoria. Elle découvrit la violette lors de ses séjours sur la côte d’Azur. En effet, en France nous possédons une ville du parfum : Grasse ! Et croyez-le ou non la violette est la seule fleur locale qui pousse à Grasse, cultivée au pied des oliviers depuis 1755. Une place de choix. Une autre grande dame fait la part belle à la violette : l’impératrice Eugénie. Selon ses dires, elle se laissa guider par son parfum pour aller retrouver jusqu’en Afrique du Sud, le lieu exact où était mort son fils unique, le prince impérial, tué par les Zoulous. Le film Violettes impériales puis L’amour est un bouquet de violettes relatent cette relation unique qui lie Eugénie aux violettes.

L'impératrice Victoria, elle, la fit cultiver en abondance à Windsor. Elle se parfume avec, en pare ses toilettes, en garde une à son chevet et fait faire ses robes d’après sa couleur. Rien que ça.

Pourtant si je vous dis, ville à violettes, je suis certaine que vous pensez davantage à Toulouse qu’à Grasse non? Alors allons voir pourquoi on associe Toulouse et la violette.

Une histoire d’avion et de fiançailles….

D’abord, la légende locale prétend qu’un soldat piémontais a offert une violette de Parme à sa fiancée qui habitait à saint Jory.
Mais c’est surtout à M. Latécoère, figure emblématique de l’aviation commerciale, que l’on doit l’association floristique que l’on connait aujourd’hui.

C’est en effet le premier à avoir fait de Toulouse un site aéronautique en franchissant la distance de Toulouse à Rabat dans la journée.

Pour marquer le coup, il apporte au maréchal Lyautey, le journal Le Temps acheté le matin à Toulouse et à sa femme un bouquet de violettes qui a conservé toute sa fraîcheur. 

Par la suite, un conservatoire  de la violette de Toulouse sera créé et quelques horticulteurs s’attacheront à relancer la culture de la violette. Et donnera naissance à la violette cristallisée que l’on connait depuis.

Fleur timide au parfum ensorcelant, la violette avait au Moyen Age une réputation de fleur aphrodisiaque : on la mélangeait avec de la lavande pour garnir des oreillers qui prédisposaient à l’amour grâce aux effluves sensuels. En effet, si la violette est humble, elle est également suave, nous l’avons vu avec son parfum proche de celui de l’iris.

C’est une des odeurs qui triomphera pendant la Renaissance. C’est une époque au coeur des préoccupations sur le parfum, on rivalise de parfums tenaces, à grand renfort de musc et d’ambre qui masquent les odeurs corporelles ! La violette se démarque par sa note suave mais bien plus douce. Son parfum velouté et végétal s’impose, gage de bon goût et de distinction.

De la fleur est née une couleur et comme le remarque Pastoureau “ l’une des dimension du violet est celle de l’ésotérisme, de la magie, du mystère et du sacré »

Ainsi le violet, passe pour symbole de l’élévation spirituelle, c’est la septième couleur de l’arc en ciel, porte ouverte sur l’infini, elle calmerait les angoisses.

C’est aussi la couleur du septième chakra chez les hindous qui symbolise l’équilibre entre le ciel et la terre, entre la vie et la mort.

Une conception pas si lointaine de la nôtre : dans la religion catholique, le violet évoque l’autorité de l’église, c’est la couleur que portent les évêques, tardivement certes, car elle évoque la tempérance, une des quatre grandes vertus. Couleur liturgique des périodes de l’attente, de la pénitence et de l’avent, du carême et du deuil. 

Du symbole de la spiritualité à celui de…la mort !

Les rois de France, à partir du seizième siècle  portaient par privilège le violet au lieu du noir en signe de deuil. Plus tard, c’était la couleur recommandée de demi-deuil c’est à dire après un an de deuil. 

Mais depuis toujours, chez les Romains la violette était la fleur du jour des morts et la coutume était d’aller orner les tombes lors du dies violaris.

Un lien que l’on retrouve chez Bernardin de St Pierre dans Paul et Virginie : les pâles violettes de la mort se confondaient sur ses joues avec les roses de la pudeur. 

Alors, suave, humble, aphrodisiaque, lequel de ces traits aviez-vous reconnu dans la violette de vos champs ?


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