La pivoine, fleur des rois et fleur de Chine !

La pivoine, on la connait bien. Elle pare bien souvent les tenues des mariées ou les bouquets de printemps. Mais laquelle ? La famille des pivoines se partage en deux grandes catégories : 

  • Les pivoines herbacées que l’on trouve à l’état endémique dans tout l’hémisphère nord : elles sont vivaces, leurs tiges disparaissent en automne pour ré-apparaitre au printemps. Leur culture a cependant débuté en Chine. C’est celles que l’on connait le plus.

  • Les pivoines arbustives, natives de Chine et des contreforts de l’Himalaya. Des petits arbustes dont les tiges sont visibles toute l’année. Elles sont bien plus rares autour de nous.

En effet, la pivoine ne vient pas de chez nous, elle est originaire d’Asie ! Là-bas, elle est vénérée depuis 2500 ans et fait toujours l’objet d’un véritable culte. Comme toujours faisons un petit arrêt étymologie pour comprendre.

“Toute pivoine cultivée vient de Chine où cette fleur vénérée depuis 2500 ans fait toujours l’objet d’un véritable culte.”

La première mention de la pivoine apparait dans Le livre des odes, un recueil chinois de chansons antiques. Il s’agit des pivoines herbacées. Une fleur si populaire dans cette partie du globe qu’un festival de la pivoine a lieu dans les jardins de Wu Zetian, seule impératrice chinoise de l’histoire. Une légende circule d’ailleurs à ce propos.

“Wu Zetian se promenait un soir d’hiver dans ses jardins de Xian bien tristes sans floraison. Elle ordonna à ses fleurs de s’ouvrir pendant la nuit et toutes acceptèrent sauf la pivoine. Elle renvoya alors ses pivoines dans les jardins de Luoyang, province de Henan, où elles s’épanouirent et se multiplièrent.”

Ainsi, en Chine, elle est la reine des fleurs, la fleur des rois. Un calligraphe du 11e disait même qu’elle était la seule « vraie fleur au monde » Elle est symbole de la richesse, beauté, fécondité. C’est alors presque une fleur nationale, même si elle n’est pas désignée comme telle. Elle a ainsi toujours été représentée sur des objets, en porcelaine fine notamment.

Shaoyao ou Mudan ? Un point sur le parcours de la pivoine.


Depuis le sixième siècle shaoyao désigne la pivoine à fleurs blanches dont dérivent les herbacées. C’est un botaniste allemand qui introduisit la lactiflora en Europe vers 1784.

Entre 1805 et 1808, trois plants de cette lactiflora gagnèrent la Grande Bretagne donnant naissance à des variétés qui furent ensuite diffusées dans toute l’Europe grâce à des hybrideurs passionnés. 

Le terme Mudan est réservé, également depuis le 6eme siècle, à la pivoine en arbre que l’empereur Yang Ti avait placé sous protection impériale et que les Occidentaux n’ont appris à connaitre qu’aux 18eme et 19eme siècle grâce à des importations chinoises assurées par les Britanniques. 

C’est en 730 que les pivoines arrivent au Japon où les variétés chinoises échevelées laissent place à des variétés plus simples mais qui interviennent largement à leur tour pour décorer objets d’arts, assiettes, kimonos etc. 

Les Grecs l’avaient baptisée paionia, nom que les romains transformèrent en Paeonia, un mot que l’on voit émerger en France au 12e siècle. 

Selon la mythologie, Péon était en effet un maitre guérisseur disciple d’Asclépios, le dieu de la médecine. Il se permit de soigner de sa propre initiative Hadès, le maitre des enfers blessé par Héraclès, après avoir découvert les bienfaits de la racine d’une mystérieuse plante aux fleurs magnifiques. Furieux, son maitre décida de tuer son élève mais Zeus intervint et métamorphosa Péon en une plante qui porte son nom.

C’est dans les épopées homériques au 7eme siècle avant Jésus-Christ que l’on trouve l’origine de cette appellation car Paionia veut dire littéralement “plante à guérir”.

C’est sa racine qui possède de multiples vertus !

Et la science moderne l’a reconnu. C’est dans la paeoniflorine que réside des vertus analgésiques, sédatives, anti-inflammatoires et anti-spasmodiques. La médecine chinoise recommande la racine de pivoine blanche en décoction pour améliorer la circulation sanguine, décontracter les muscles et soulager les crampes menstruelles. 

On peut l’utiliser séchée et fragmentée, en infusion ou décoction.

Quant aux Anciens, Hippocrate, Théophraste et Pline L’Ancien lui reconnaissent de nombreuses vertus : elle soignerait l’épilepsie, régulerait les menstruations, favoriserait l’expulsion du placenta, guérirait les tumeurs et soignerait les problèmes neurologiques. C’est dire si elle mérite son appellation de plante à guérir. On retrouve bien des croyances en Chine à propos des convulsions : il était recommandé de porter des graines de pivoine rouge récoltées par une nuit sans lune.

L’extrait de racine de pivoine est aussi un produit de beauté tant pour la peau que pour les cheveux car elle procure des bienfaits anti-âge. Coïncidence ou non, une nymphe grecque, réputée pour sa grande beauté a, elle aussi été transformée en pivoine.


Péone était d’une grande beauté, courtisée par les dieux, elle osa enfreindre le code de la pudeur et comme punition, fut, elle aussi métamorphosée en pivoine, fleur magnifique mais fleur rouge, couleur de la honte. 

C’est la raison pour laquelle on dit rougir comme une pivoine, une expression qui inspira à Huysmans le verbe pivoiner.

« Je t’aime, tu m’aimes, je te l’annonce, tu tâches de pivoiner et de baisser tes stores, toutes les femmes font ça pour enjôler les hommes.  »
— Huysmans, Soeurs Vatard, 1879, p.126).

Arbuste ou herbacée ?

Comme nous l’avons évoqué au début de cet article, il existe deux types de pivoines. Eh bien, un jour, un Japonais pris d’une obsession botanique décide de croiser les deux familles ! Cela, afin d’obtenir le meilleur des deux.

Il y passe de longues années, réalise des milliers de croisements sans succès mais un jour il y parvient enfin. Il ne pourra cependant pas voir fleurir la pivoine de ses rêves, il mourra avant. C’est alors grâce à un autre passionné, cette fois-ci américain, Louis Smirnow que la pivoine voit le jour et est prête à être vue telle que nous la voyons aujourd’hui.

Mais, aussi étonnant que cela puisse paraitre, l’âge d’or de la pivoine, c’est le Second Empire ! L’auteur de Les fleurs se racontent nous explique que cela est dû aux photos de Charles Aubry.

Vous comprendrez dorénavant la subtilité des pétales de la pivoine !




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